La Guadeloupéenne Kelly Sinnapah Mary à la Maëlle galerie, à Paris

C’est par un solo show de Kelly Sinnapah Mary qu’est lancée la saison de la Maëlle Galerie à Paris. Dès le vendredi 19 septembre, le public parisien pourra aller à la rencontre du point de vue esthétique de l’artiste guadeloupéenne à travers l’installation « Vagina, Jyoti Singh Pandey ».

La Maëlle Galerie pose une fois de plus « son regard sur les artistes Caribéens » et ouvre cette fois sa galerie à l’artiste contemporaine Kelly Sinnapah Mary. L’artiste guadeloupéenne a créé en 2012 le concept de Vagina qui l’a notamment conduite, avant cette halte parisienne, au Pérez Art Museum de Miami il y a quelque mois dans le cadre du Caribbean: Crossroads of the World. Aujourd’hui, elle continue d’interroger sur la représentation des femmes dans la société et sur les « violences symboliques ou physiques » qui leur sont faites, comme elle l’a expliqué au PAMM. À Paris, le concept se singularise avec « Vagina, Jyoti Singh Pandey », du nom de la « jeune étudiante indienne victime à New Dehli en 2012 d’un viol collectif dans un bus, et dont la mort entraînera en Inde de vives réactions populaires« . Cette adaptation permet de poursuivre une réflexion artistique que Kelly Sinnapah Mary ne veut pas réduire « à un travail féministe » afin de ne pas le priver de sa dimension universelle.

Kelly Sinnapah Mary, en solo show à Paris
« Vagina, Jyoti Singh Pandey » se présente comme « une installation inédite et in-situ imprégnée des objets, des vibrations et des rythmes du quartier de Belleville en parallèle de la biennale, une nouvelle déclinaison du concept qui toujours invite à considérer la question de domination. Plus précisément à propos de cette démarche qui traduit sa vision de ce tragique événement survenu à New Delhi, Kelly Sinnapah Mary explique : « Je ne peux m’ôter de l’esprit l’image de ces si nombreuses vitres à travers lesquelles la scène, dans ce bus, a été rendue publique, ni celle de cet espace supposément sécurisé, à la manière d’une chambre à coucher, transformée pour l’occasion en lieu de violence et de domination poussée à son paroxysme. »

Chaque déclinaison du concept trouve place dans la réflexion engagée par l’artiste, comme à Miami en avril 2014 : « à travers mon travail, je parle de domination et celle que je trouve aujourd’hui la plus prégnante, c’est la domination masculine. À travers le concept que j’ai développé, Vagina, je me suis créé un personnage avec une bouche rouge très apparente, pour mettre en exergue le caractère de victime et en même temps la prédatrice… J’utilise des techniques sensibles et très subtiles par rapport aux thèmes que j’aborde et qui parfois restent tabou, comme le viol ou d’autres violences ».

Le concept exploré par l’artiste poursuit donc ses évolutions esthétiques à travers les expositions et trouve à la Maëlle Galerie un nouveau prolongement. La condition de la femme fournit de multiples occasions de prolonger encore l’exploration : « Vagina est plus qu’une œuvre, c’est un concept. C’est un prétexte d’étude des formes d’expression plastique et esthétique permettant de traiter de la domination dans le cadre de la relation homme-femme. Cette étude m’a projetée initialement, à travers une installation, dans une chambre à coucher prise comme lieu d’expression « euphémysé » de la violence de cette domination. Cette installation, a évolué plastiquement au gré des espaces d’exposition qu’elle a investi, galerie (T&T Guadeloupe), chambre d’hôtel (Pool Art Fair, New York), médiathèque (Art Bémao, médiathèque Paul Mado). Ainsi, ces expositions en Guadeloupe ou à New York n’ont partagé que quelques éléments qui me semblaient être des axes forts et essentiels. Cette étude m’a amenée en parallèle, par le biais de la photographie, à personnifier cette violence à travers une créature dotée d’une bouche rouge démesurée. Oui, tout mon travail actuel est mû par des réflexions inscrites dans le cadre de Vagina. J’ai le sentiment d’avoir, devant moi, un immense livre blanc dont je n’ai, pour le moment utilisé que quelques pages » (Entretien avec Dominique Brébion).

Kelly Sinnapah Mary travaille sur ce qui la touche
La condition de la femme est pour l’heure l’axe de travail de Kelly Sinnapah Mary et Vagina, « œuvre en constante évolution », en est l’expression. « Faire usage du sensible, faire usage du beau, pour mieux saisir les trop cruelles vérités, voilà ce que fait l’artiste Kelly Sinnapah Mary. Que l’on ne s’y méprenne pas, ses installations nous plongent dans un univers intimiste où se dégage une douce atmosphère qui n’occulte en rien le silence des drames.

Fortement marquée par l’œuvre de Marina Abramovic, Yayoi Kusama ou encore Tracey Emin, le monde de Kelly Sinnapah Mary est saturé de réminiscences et de symboles-trames qui deviennent les moteurs d’une réflexion universelle. ‘Je travaille sur ce qui me touche et ne travaille que sur ce qui me touche ». Dans ses installations elle pointe du doigt la condition de l’être humain dans la société, les rapports dominants/dominés, l’hyper-sexualisation, ou les relations homme-femme. Mais elle aborde également d’autres sujets beaucoup plus durs tel que la castration. Ses dessins in situ de pénis en lévitation accrochés à des ballons, au rouge à lèvres sur vitre en témoignent ».

Vagina, Jyoti Singh Pandey
Solo show de Kelly Sinnapah Mary
Du vendredi 19 septembre au samedi 19 octobre 2014 (mardi au samedi de 14 h à 19 h)

Maëlle Galerie
Galerie d’art contemporain & online
1 – 3 rue Ramponeau 75020

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