Les cultures insulaires en lutte pour leur identité à l’Île de Groix

Le festival du film insulaire, qui jette l’ancre comme chaque année à l’Île de Groix, vient d’ouvrir sa 14e édition axée sur le portrait des « cultures insulaires en lutte pour leur identité » Elle met en vedette les îles Grecques et une programmation de films verra s’opposer des productions sur la Caraïbe.

Durant quatre journées, Groix se fait « carrefour des îles du monde » et le festival continue de vouloir montrer, à travers des films, d’autres vérités sur les îles et des réalités insulaires. Parmi les films en compétition, plusieurs braquent leurs objectifs sur les îles de l’océan Atlantique et passeront par Sainte-Lucie, par la Martinique et  par Haïti. La programmation promet également une « journée outre-mer » dont on retiendra qu’elle proposera deux films en relation avec la Martinique : l’un en relation avec les événements de 1974 et le second réalisé par les sœur Kanor portant sur le Cahier d’un retour au pays natal.

Le festival se vit aussi en musique et, parmi les concerts programmés, notons celui du samedi 23 à 19 h au Tiki de Port-Layavec avec Carlton Rara. La musique de cet artiste né d’une mère haïtienne s’exprime à travers « ses influences, allant du blues, reggae, vaudou, l’âme et la musique du monde pour créer éventuellement un nouveau style de la sienne ».

Le festival continue dans sa volonté de fêter la culture insulaire et pour ça met aussi le cap sur les îles de la Caraïbe. Pour l’équipe du festival, il s’agit de mettre à l’honneur « ces destinations qui renvoient a un imaginaire idéalisé qui sont souvent convoitées par des entreprises privées » et, lors de la compétition, de proposer « douze documentaires internationaux aux esthétiques variées, mais tous animés par une même volonté d’engagement en faveur de leur propre identité générée par la force de leur territoire insulaire »

Voyages, découvertes, 12 films documentaires en compétition dont certains très récents, concerts et café-rencontres avec les réalisateurs, un jury de collégiens pour la compétition des courts-métrages : autant d’événements au programme du festival de Groix dans le Morbihan où régulièrement des îles de plusieurs océans se donnent rendez-vous.

Parmi les films en compétition
Baron’s drive (Sainte-Lucie) Thierry Derouet et Loïc Hoff
Au sud de la Martinique, l’île de Sainte Lucie. Soufrière, l’ancienne capitale, constitue une étape touristique incontournable. Au bout de la baie, les cases du ghetto de Baron’s Drive. C’est le quartier des pêcheurs. L’activité ne rapporte plus comme autrefois, Desmond, Sylvester, Rudy et quelques autres vivent au jour le jour, prêts à saisir toutes les opportunités que la mer pourra leur offrir. Les autorités, assistées par des investisseurs privés, voudraient faire disparaître le quartier pour y construire une marina haut de gamme… Plongée dans le quotidien d’une petite communauté bien décidée à ne pas céder.

Sainte-Lucie, dans les petites Antilles britanniques. Depuis les années 90, l’île a misé sur le tourisme et vu un grand nombre d’hôtels se construire sur le littoral. C’est le cas à Soufrière, l’ancienne capitale. Au bout de la ville Baron’s Drive, le quartier des pêcheurs. Planté au bord de l’eau, il suscite les convoitises et des investisseurs privés aimeraient voir disparaître le ghetto pour y construire une marina. Plongée dans le quotidien d’une petite communauté partagée entre résistance et argent des touristes.

Deported (Haïti) Rachèle Magloire et Chantal Regnault
A travers une série de portraits, ce film donne la parole à des « déportés », ces délinquants des États-Unis ou du Canada (condamnés pour des peines plus ou moins graves), expulsés vers leur pays d’origine, Haïti, à la fin de leur peine de prison en Amérique du Nord. De retour à PortBauBPrince qu’ils ont quitté enfant, une nouvelle vie commence pour ces « américains » abandonnés dans un environnement qui leur est non seulement complètement inconnu, mais totalement hostile.

Les petits états des Caraïbes subissent fortement le poids de cette ré-immigration forcée d’une population inadaptée à ce retour. Leur famille est loin, ils ne maîtrisent pas le créole. et manquent de moyens pour gérer une quelconque intégration. Le film est construit autour d’allers-retours entre Haïti, où se trouvent ces « déportés », suivis pendant trois années avant le tremblement de terre, et l’Amérique du Nord où leurs familles n’ayant pas idée de la nouvelle vie de leur proche, sont partagées entre inquiétudes, reproches et regrets.

Après un moratoire d’un an suite au tremblement de terre meurtrier du 12 janvier 2010, les déportations ont repris en janvier 2011.

Les horizons chimériques (Tahiti, Guyane), de Gilles Dagneau
Ils ont atteint le point de non-retour. Bruno, Jean-François, David et les autres… ont quitté la France, il y a plusieurs décennies. Ils ont succombé au mythe des pays ensoleillés, fascinés par l’immensité des océans, absorbés par les profondeurs des forêts. Une fois sur place, il a fallu déchanter : trouver un emploi s’est révélé difficile et aujourd’hui, ils vivent de la débrouille, marginalisés, déracinés, en rupture avec la société. Avec leurs rêves et des chimères qui s’égarent dans une réflexion largement obscurcie par l’alcool ou la drogue. Certains sont à la dérive, d’autres assument pleinement un choix de vie en osmose avec une nature sauvage et aimée, d’autres enfin se persuadent que tout est encore possible et acceptent une réalité peu reluisante.

Ils nous racontent leur histoire, leur vie au quotidien, leurs déconvenues dont aucune n’aura cependant altéré une immense soif de liberté.

Nous irons voir Pelé sans payer (Martinique), Gilles Elie-Dit-Cosaque
En janvier 1971 le Santos FC, le mythique club de foot de São Paulo avec à sa tête le non moins mythique “roi Pelé” débarque en Martinique afin de disputer un match contre les meilleurs joueurs locaux. La belle affiche a un prix, le coût du billet est multiplié par 10 mettant l’événement hors de portée de la plupart des Martiniquais. Un groupe d’extrême gauche fraîchement constitué baptisé “Groupe d’Action Prolétarienne (GAP)”, qui puise ses influences chez Mao et Frantz Fanon, voit là l’occasion d’un premier coup d’éclat politique. Tout est bon pour la révolution. Ils mettent en branle un mouvement dont le mot d’ordre sera « Nous irons voir Pelé sans payer ».

Et pendant que l’équipe martiniquaise s’entraîne la campagne s’organise. Grèves, tracts, graffitis, manifestations à Fort de France, le mouvement prend de l’ampleur…

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